Résumé
Le développement de sociétés plus économes et plus sûres passe par l’amélioration des moyens de transports et de production d’énergie. Au sein de ces moyens, les machines tournantes occupent une place centrale. Pour répondre à ces enjeux sociétaux, il est donc essentiel que la technologie des machines tournantes innove et progresse sur les thèmes suivants : performances (rendement, puissance massique, précision, confort, miniaturisation), réduction des coûts et des nuisances tout en continuant à maintenir (voire à améliorer) la fiabilité, la pérennité et la sécurité des composants. Pour cela, il convient d’identifier et de savoir traiter avec anticipation les problèmes scientifiques complexes qui y sont associés. Aussi l’objectif scientifique du projet est de proposer une démarche validée qui garantit l’intégrité des systèmes en prévenant leur instabilité et leur rupture tout en minimisant les consommations énergétiques. Cet objectif contradictoire impose de faire des expérimentations conduisant à la rupture par instabilité ou par choc, de les comprendre en les simulant numériquement et d’accroître ainsi nos capacités à développer une conception virtuelle fiable permettant d’optimiser la sécurité, le rendement énergétique et son impact environnemental.
L’origine de ces situations mécaniques sont par exemple des instabilités d’interaction (couplage fluide/structure, structure/structure, …), d’excitations (sismique, charges de manœuvre,…), ou encore d’impacts (par exemple une ingestion d’oiseau) qui peuvent conduire à des situations catastrophiques (Figure 1 et Figure 2). Les prochaines avancées scientifiques et techniques se feront en repoussant les limites dans ces zones de comportements extrêmes. En effet, les marges de sécurité excessives, liées à une absence de maîtrise des incertitudes, excluent actuellement le domaine de fonctionnement des machines tournantes de certaines zones à haut rendement énergétique. La plate-forme proposée aura donc pour objectif de lever ces verrous scientifiques. Une fois ceux-ci franchis, on aura alors la possibilité d’accroître simultanément la fiabilité et les performances des réacteurs et des systèmes de production d’énergie. Pour répondre à ce challenge, le projet PHARE proposé consiste en une plate-forme originale et unique sur le plan national et international, déclinée selon trois modules d’essais complémentaires qui ont pour objectif commun de tester et d’analyser l’intégrité des machines tournantes. Les thèmes scientifiques principaux couverts par cette plate-forme correspondent donc aux domaines suivants :
- Instabilités structurelles liés au processus de rupture et de contact
- Instabilités aérodynamiques, aéroélastiques, et signatures aéroacoustiques
- Instabilités structurelles liés aux sollicitations externes
Ce champ scientifique est rarement couvert par des essais expérimentaux représentatifs car il souffre du caractère explosif et destructeur de l’essai lui-même. Le manque de données fiables et pertinentes a pour conséquences un manque de robustesse et de précision des simulations numériques indispensables à une conception et une optimisation maîtrisée de ce type de système. En effet, la plupart des bancs d’essais en laboratoire sont généralement conçus pour n’accepter aucun phénomène de rupture et ne sont souvent en similitude que vis-à-vis d’une seule physique. Si les phénomènes de ruptures et d’instabilités sont au cœur du projet, l’aspect couplage multi-physique est lui aussi central. Il n’existe pas à ce jour de banc d’essais qui soient en similitude sur plusieurs physiques (matériaux, mécanique, aérodynamique, acoustique) qui permettraient de tester convenablement les couplages et les mécanismes d’instabilité qui en découlent.
Les recherches menées sur la plate-forme PHARE permettront de concevoir la machine tournante du futur dotée d’une architecture innovante, équipée de paliers non polluants (comme les paliers magnétiques actifs ou hybrides), de systèmes intelligents embarqués (pour un fonctionnement autonome et la détection précoce des signaux faibles de dysfonctionnement), permettant de répondre de plus en plus aux critères d’ultra-compacité, et de fonctionner dans une gamme étendue de vitesses (pour adapter la production d’énergie à la demande), tout en offrant une robustesse à bien des épreuves attendues voire inattendues dans un contexte de sollicitations souvent extrêmes.
Les enjeux économiques et environnementaux sont par ailleurs démultipliés par l’augmentation continue de la taille des machines (réacteurs d’avion ou turboalternateurs) consécutive à l’optimisation des coûts et la relance de grands programmes comme celui de l’énergie nucléaire. Disposer de machines innovantes et fiables constituera un atout indéniable pour les constructeurs nationaux et engendrera par voie de conséquence des retombées positives sur l’emploi. Le projet PHARE permettra de développer des projets de recherches originaux, menés par une équipe scientifique de tout premier plan comportant des mécaniciens des structures, des matériaux et des fluides, des acousticiens et des physiciens. La participation d’acteurs économiques majeurs permet d’assurer une orientation des développements en accord avec les besoins sociétaux et économiques du pays. La longue expérience des laboratoires du projet dans la recherche partenariale liée au transport et l’énergie, et le nombre conséquent dans le projet d’entreprises nationales appartenant au domaine de la machine tournante rendent le projet PHARE crédible, réalisable et donnent une réelle capacité à le faire fonctionner et à l’amortir de façon autonome. D’autre part, les établissements partenaires se sont engagés à y mettre en œuvre des moyens humains de type ingénieur d’étude et de recherche ainsi que des installations adaptées au besoin de la plate-forme, lui procurant ainsi une visibilité claire. Les partenaires universitaires s’attacheront bien entendu à déposer des brevets et à publier, critères très sensibles dans les évaluations de l’AERES, du CNU et du Conseil National du CNRS en accord avec les conventions signées avec les partenaires industriels.